Dimanche 3 décembre 2006 à 22:00
Elle a le dos droit sur le dossier de son tabouret. Ses longs doigts courent sur les touches noires et blanches. La musique la transporte, ses yeux sont fermés. Qui plus est, c'est sa musique qui la transporte. A chaque mesure son univers. A chaque nuance son intensité. A chaque temps son ambiance.
Les images lui reviennent.
Une plage inconnue. Il est un peu plus de 2h30 du matin. Elle observe le mouvement des vagues. Les lumières au loin. Elle est assise, le sable est mouillé. Elle s'en fiche.
Elle n'a presque rien sur le dos. Nous sommes au mois de février, sur une plage exposée à tout vents, devant l'océan Atlantique. Elle s'en fiche. On de découvre pas, on admire pas sous une épaisse couche de pulls et de vêtements.
Question de principes.
Un balcon. Grand, long. D'en bas, de la grande salle, s'élève une musique. Ils font une soirée. Ils s'amusent, peut-être.
Marcher. Le gravier crisse sous son pas. S'asseoir. Sur la rambarde.
Laisser perdre ses yeux dans la nuit noire qui semble s'étendre à l'infini. Les jambes qui se balançent dans le vide. Une tache noire sur fond rouge. Un tube blanc sur fond noir. Une tache rouge sur fond blanc.
Il fait froid ici aussi. La cigarette se consume. La fumée portée par le vent ne revient pas vers elle. Elle voudrait partir avec.
Nuit. Encore. Ou début du jour. Elle n'en sait rien. Mais connaît le reste. Il n'y a pas qu'elle. Ses notes, dans le fond, deviennent mélancoliques, tristes et joyeuses à la fois. Rapides comme l'instant qui passe trop vite, et s'étirant sans fin comme l'impression qu'il en reste.
Changement, la chaleur est enfin là. Pas pour longtemps. Et la pianiste le sait, alors que ses doigts tremblent, mais continuent de suivre la partition inexistante.
Le coeur tombe, la chute ne semble pas vouloir s'arrêter un jour, se ralentit, s'accélère, jamais ne stoppe.
Nuit. Pas noire. Ni bleu. Nuit couleur.. lointaine. Etrange. Agréable. Mystérieuse sans doute. Plus de gravier. Plus de froid, ni de chaleur. Elle ne sent plus son coeur tomber. Non. Elle ne sent plus son coeur.
Il est déposé, attend quelque chose. Ce n'est pas son habitude. Elle le fait pourtant. Cela se voit. Que ce n'est pas son habitude. Elle rêve. Une seconde, ou moins. Silence. Reprise. La rupture n'aura pas donné un souffle nouveau à la musique.
Elle reprend. Tranquillement. C'est son habitude. Que peut-elle faire d'autre ? Composer un nouveau morceau ? Elle ne s'en sent pas la force. Il faudrait commander au coeur d'arrêter sa chute.
Lui, n'écoute guère. Continue ce qu'il avait commencé. Toujours plus bas. Là où elle ne sent rien. Les entrailles s'ouvrent à grands coups de hasard.
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