Elle s'était jetée dans son lit : elle avaut eu un coup de chaud en même temps que les larmes lui étaient venues, bien accompagnées par les tremblements de sa lèvre supérieure.
Elle savait à quoi elle ressemblait (l'expérience sans doute) une grande perche, une grande loque à semi allongée, la tête enfouie dans la couette amassée au bout du matelas, en dessous de ses bras.
Elle sent douloureusement son oreillle, le grand anneau argenté a été arraché par la gifle, elle sent aussi son mascara couler et couler, mêlé à ses larmes, ruisselant le long de son visage et de son cou blancs.
En abondance. Elle tente de reprendre une respiration normale mais est à nouveau secouée par un sanglot. Après un temps qui passe comme une éternité de pleurs.
Elle serre dans ses bras le tissu. Envie d'une cigarette. Et pourquoi pas aller lui en voler une et la fumer, sans se cacher, dans la chambre ? Elle n'est plus à ça près ce soir. Depuis deux jours elle se taisait de peur de reprendre la dispute inachevé d'il y a quelques semaines. Naïve qu'elle était. Maintenant c'est sur : rien ne sera jamais plus comme avant.
Elle descend les escaliers tout à fait normalment, après avoir séhé ses joues. Sa gorge la gratte, pas à cause des cris, non. Elle n'a pas crié. Oh non, elle a hurlé, de toutes ses forces.
Une insulte s'est gravée en elle, d'injustice et de cruautée, même si ce n'était pas la première fois, loin de là. A écrire ses mots elle lui revient comme un poignard dans sa chair et il faut s'arrêter un instant avant de repartir de plus belle.
Sa grand-mère, à qui elle ne peut penser qu'avec douleur. Mais non, pas de suite. Elle descend donc les escaliers et retourne au bureau, pour son bloc-notes et son stylo noir, qu'elle prend sans se cacher, devant sa mère, jouant sur l'ordinateur à des jeux sans sens et fumant des clppes dégueulasses.
Plus tard, depuis sa chambre, elle l'entendra tousser à s'en déchirer la poitrine, et aura envie de lui crier "T'as bien raison ! Crève à 45 ans d'un cancer du fumeur". Non. Là elle remonte et après avoir posé deux mots sur le papier elle pense aux autres et envoie un SMS. Etrange...
Elle se remet devant la feuille et écrit dans l'obscurité naissante, revivant de ce fait les coups, les injures, se sentant sale et étonnament souillé. Elle avait voulu frapper, faire couler ce sang dont elles partagent une partie alors qu'elle insultait l'autre.
Larmes à l'encre.
Elle s'était retenue et s'était vue, avec horreur mais aussi avec un certains délice sadique, sur le visage hystérique, les traits enlaidis par la colère, elle n'avait pu réprimer cette envie de devenir folle et avait tenté de poursuivre l'affrontement, dans lequel les cris de rages, les jurons et les mouvements compulsifs lui paraissaient admissibles.
Elle échoua, c'est ainsi qu'en se trouvant en train d'écrire elle entendit ce qui lui parû extraordinaire "Margaux vient te brosser les dents". elle comprit qu'il convenait de ne rien en dire.
Et alors qu'on lui reproche son manque d'obéissance elle s'en va, machinalement, obéir à un autre aussi ridicule que dérisoire à cette heure nouvelle. Elle se brosse donc les dents, passe un coton sur son visage et enlève même les coulées de mascara marron. Alors qu'elle sait bien qu'elle restera pour longtemps encore, malpropre. Des piques, encore, absurdes et blessantes auxquelles elle ne répond qu'un "Bah !". Elle retourne à sa chambre, à son monde. Vérifie l'accusé de réception, remarque le mascara sur l'oreiller. Se trouve une subite envie d'aller sur le toit. Non, elle va continuer à écrire encore un peu. Puis elle décroche le méli-mélo "familliale", (pour elle ce n'est plus une famille, seul un vaste ensemble de personnes mêlant les coucheries et les trahisons), avec l'aide d'un couteau suisse.
Bizarre, les photos en quittant la place qui leur est dévolue depuis maintenant des années semblent se rapprocher d'elle, elle les voit plus, les rend vivantes. Les clichés prennent du sens.
La tête par le velux elle s'ennivre de la nuit parce qu'elle sait que là-bas c'est la même.
Va se coucher, reçoit une réponse et un autre sms.
Merci.
MAIS MERDE !!!
MA GRAND-MERE !